Phénomène Barça-Barsakh : Aly Ngouille contre la criminalisation

Le patron de la police estime qu’il n’est pas besoin de pénaliser encore plus les victimes de l’émigration clandestine qui sont déjà exploités par les passeurs.

Malgré la recrudescence du phénomène migratoire, le ministre de l’Intérieur ne juge pas utile de criminaliser ce délit. «Nous avons aujourd’hui un arsenal qui existe pour condamner de façon très ferme, notamment les convoyeurs. Les voyageurs sont considérés comme des victimes. Quand on subit une traite, on est victime. C’est plutôt ceux qui vivent de ça qu’il faut poursuivre. On n’a pas besoin de criminaliser le système pour les condamner», a-t-il indiqué hier, en marge de la signature du document cadre de collaboration axé sur le renforcement de la mise en œuvre de la coordination du suivi des activités liées à l’entreprenariat à l’échelle des circonscriptions territoriales.
Selon Aly Ngouye Ndiaye, les dispositions qui sont en train d’être prises vont servir à renforcer la sécurité. D’ailleurs, a indiqué le ministre de l’Intérieur, «aujourd’hui, 28 présumés convoyeurs sont entre les mains de la justice». Et le premier policier du Sénégal est convaincu que la justice fera son travail. «Ils seront condamnés parce qu’ils participent aujourd’hui à l’émigration clandestine par voie maritime de ces jeunes», a-t-il affirmé.
A l’en croire, le dispositif fonctionne très bien. «Nous avons pu empêcher le départ de plusieurs jeunes. Il y a beaucoup de jeunes qui n’ont même pas eu l’occasion de prendre la mer. C’est un ensemble parce que les gens y vont avec des astuces qu’on parvient à déjouer. Ce qui montre que c’est de vrais trafiquants qui sont derrière. Nous avons connu une accalmie. Pendant un certain temps, quand le dispositif était très fort, on n’utilisait plus les côtes sénégalaises, mais ils prenaient la route. Avec les restrictions qui entravent les déplacements, avec la fermeture des frontières, les déplacements ne sont plus possibles. Ils ont repris, mais avec les nouvelles dispositions, on aura des résultats les jours à venir et arrêter cela», assure-t-il.

Les solutions de la Der
De son côté, le Délégué général à l’entreprenariat rapide (Der) a estimé que c’est un phénomène conjoncturel. Et selon Papa Amadou Sarr, la Der n’a pas besoin de réajuster son programme. D’après lui, il y a 65% de jeunes et femmes concernés par l’émigration. Pour les décourager dans cette aventure périlleuse, M. Sarr a raconté sa propre expérience. «Moi-même j’ai été en Espagne, à Ceuta, Melilla, Barcelone, Brescia. J’ai fait 15 ans en Europe. J’ai fait ma thèse de doctorat en Sciences et éducation sociales. J’ai travaillé sur la question de transferts d’argent des migrants sénégalais, comparés aux Maliens. J’ai fait deux ans d’enquêtes dans les foyers à Charonne, Barbès, Mantes-La-Jolie. Les conditions de vie de ces jeunes sont déplorables. Ils se réveillent à 8 heures pour aller dans les champs en Espagne pour cueillir des tomates ou des fruits jusqu’à 18 heures. Ils rentrent chez eux où ils dorment à six dans une même chambre. Ils gagnent 1 500, 2 000 euros au maximum. S’ils envoient de l’argent à la maison, il ne leur reste plus rien pour vivre», raconte-t-il. Selon toujours lui, les jeunes peuvent trouver ces choses ici.
«On a financé des jeunes, des femmes dans des vergers à 10, 15 millions de francs au nord, et au sud du Sénégal. Nous avons financé des jeunes qui étaient partis en émigration clandestine et qui sont revenus. Ils ont des fermes à Vélingara, Linguère, Sédhiou, Matam, et Podor», a déclaré M. Sarr, persuadé de la justesse de sa politique.
D’ailleurs, il annonce un nouveau programme de 5 milliards de francs pour les zones de départ, dans le cadre d’un programme avec la Bad. «Il concerne Matam, Sédhiou, Kolda, Louga et la banlieue dakaroise, surtout Rufisque et les quais de pêche de Soumbédioune et de Ouakam. Le Président a mis des instruments pour leur permettre d’avoir un emploi salarié.» Une idée partagée par le ministre de l’Intérieur qui a estimé qu’il faut donner des opportunités, car il pense que ce n’est pas l’émigration qui va régler le problème. La signature du document cadre de collaboration vise à matérialiser la collaboration de la Der avec l’Administration territoriale.

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